Médecins de la Grande Guerre

Félix Fleur, étudiant en médecine, devint instructeur à Granville !

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Félix Fleur, étudiant en médecine, devint instructeur
à Granville !



Introduction

       Sa vie est résumée dans l’article ci-dessous et qui provient d’un petit livre publié en 1988 à l’occasion des septante ans de la fin de la Première Guerre mondiale (S. Diricq, 1914-1918), journal de campagne. La petite histoire de la Grande Guerre, Editions « Le Courrier de l’Escaut ». Le récit est certainement incomplet et on voudrait en savoir plus sur Félix Fleur.

       Peut-être aurons-nous cette possibilité grâce à un des habitants d’Ellezelles, son village natal. L’article de S. Diricq nous dit que Félix obtint en octobre 1918 un laisser-aller pour rejoindre l’Angleterre afin de continuer ses études de médecine. Ce fait est assez curieux car à cette époque, pour rejoindre l’Angleterre, il fallait le faire clandestinement et en passant par le Hollande !  Félix aurait voulu, écrit l’auteur, continuer ses études de médecine en Angleterre.

       Ce fait est peut-être vrai, mais on aimerait mieux connaître le parcours de Félix lors de son arrivée en Angleterre. S’est-il vraiment inscrit à l’université célèbre du King’sCollege of London ? C’était peut-être sa volonté première mais on peut supposer que rapidement l’engagement comme volontaire à l’armée belge prévalut puisqu’on retrouve déjà Félix à Grandville au début de l’année 1915. Les quelques semaines passées en Angleterre lui laisseront cependant le temps suffisant pour tomber amoureux d’une infirmière anglaise nommée May avec qui il entreprendra une correspondance assidue dont on voudrait relire aujourd’hui la teneur car vous le verrai ci-dessous, Félix ne manquait pas de talent littéraire !

Dr Loodts P.

L’adjudant Félix Fleur, un enfant D’Ellezelles mort à Ypres
le 28 septembre 1918 (écrit par S. Diricq)

RAPPELLE-TOI !

Rappelle-toi quand l'aurore craintive
Ouvre au soleil son palais enchanté
Rappelle-toi lorsque la nuit pensive
Passe en rêvant sous son voile argenté
A l'appel du plaisir lorsque ton sein palpite
Aux doux songes du soir lorsque J'ombre t'invite
Ecoute au fond des bois
Un murmure d'une voix : rappelle-toi

Rappelle-toi lorsque les destinées
T'auront de toi pour jamais séparé
Quand le chagrin, l'exil et les années
Auront flétri le cœur des expirés
Songe à mon triste amour
Songe à l'adieu suprême
L'absence ni le temps ne sont rien quand on aime
Tant que mon cœur battra
Toujours il te dira: rappelle-toi !

Rappelle-toi quand sous la froide terre
Mon cœur brisé pour toujours dormira
Rappelle-toi quand la fleur solitaire
Sur mon tombeau doucement s'ouvrira
Je ne te verrai plus, mais mon âme immortelle
Reviendra prés de toi comme une sœur fidèle
Ecouter dans la nuit
Une croix qui gémit
RAPPELLE-TOI !

       Ce poème aussi romantique que prémonitoire est l'un des derniers écrits laissés par Félix Fleur. Né le 1er avril 1895 de deux vieilles familles d'Ellezelles (les Fleur et les Delacroix), il est étudiant en médecine lorsque la guerre éclate. Début octobre 1914, le bourgmestre de la commune lui octroie un laissez-passer pour l'Angleterre afin d'y continuer ses études, ce qu'il fait au King'sCollege à Londres. Il y rencontre également une adorable infirmière, May, avec laquelle il correspondra jusqu'au bout.

       INSTRUCTEUR A GRANVILLE. - Début 1915 le verra soldat au Centre d'instruction de l'armée belge à Granville, ancien port de pêche français. L'armée belge est bien pauvre car, pendant quelque temps, les recrues n'ont d'autre uniforme qu'un brassard aux couleurs... françaises, revêtu d'un cachet « Armée belge – Centre d'instruction de la 29e Armée » !

       Félix Fleur restera à Granville comme instructeur en gravissant les échelons de la hiérarchie militaire jusqu'au grade d'adjudant... car l'étoile de sous-lieutenant doit se gagner au front ; mais blessé à l'exercice, il se remet difficilement...

       Entre-temps, il entretient une correspondance assez sincère avec Mayet avec d'autres soldats originaires d'Ellezelles, comme le futur sénateur et bourgmestre Jean Linois, le sous-lieutenant Hermant qui se bat en Afrique dans les rangs de la Force publique du Congo belge (les lettres nous le montrent très belge, très râleur contre le « blinquage des bottines, l’enroulage des jambières, le vernissage des sabots... » et très chaleureux envers ses copains, et aussi patriote et « mangeur de boches »). II correspond également avec les siens restés en Belgique par le fameux « mot du soldat ». II s'agit en fait d'un petit document, sur papier pelure, que de courageux passeurs (dont Gabrielle Petit) recueillent ou apportent dans les familles, et qui transiteront par la Hollande.

En première ligne à Ypres.

       Un commerçant de Rotterdam sert également d'intermédiaire entre notre jeune sous­officier et sa famille pour lui envoyer nouvelles et... argent (cent à deux cents francs à la fois, qu'il partage d'ailleurs !) Des lettres de May traduisent l'opinion des Anglais au sujet des Belges, soit des rapports de leurs jeunes femmes avec nos soldats : « Mon infirmière en chef m'a encore fait des remarques sur mes folies extrêmes » (ses relations avec Félix Fleur), soit de l'attitude des réfugiés, en particulier des pêcheurs ostendais : « Je pense que la meilleure chose à faire avec la Belgique, quand la guerre sera tinte, le ciel sait combien ce sera long, est de commencer par l'éduquer » (lettre d'octobre 1915). Malgré son modeste salaire (14 pence par mois), May continuera tout de même à lui envoyer courrier et cadeaux... Dans la première moitié de l'année 1918, le Haut commandement belge bat le rappel de toutes les forces disponibles en vue de la dernière offensive, l'offensive libératrice. C'est ainsi que Félix Fleur, adjudant au 16e régiment de Ligne, se bat dans la région d'Ypres. II y sera tué le 28 septembre 1918...




 

 

 



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