Médecins de la Grande Guerre

Miss Jones s'occupa de la maternité créée pour les réfugiées belges à Folkestone. (Mary Burr)

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Miss Jones s'occupa de la maternité créée pour les réfugiées belges à Folkestone (Mary Burr)

Quand Folkestone dut faire face à l'afflux des réfugiés belges, il devint vite évident qu'un des besoins des plus urgents était de  créer une maternité pour les nombreuses femmes qui arrivaient enceintes. Madame Muir, une philanthrope, prit rapidement les choses en mains et demanda à  Miss Jones, une infirmière chevronnée qu'elle connaissait bien, de  s'occuper de la future maternité. Une maison vide se trouvant Sandgate Road  qui avait été occupée récemment par des bureaux fut louée et rapidement équipée grâce à la générosité de Mr Muir et d'autres donateurs. Toutes les chambres firent équipées de  chauffage au gaz  de telle sorte que  les malheureux  ne souffrent pas de la fraîcheur habituelle de la maison anglaise. Juste avant que les préparatifs de la maison furent achevés, une pauvre femme arriva et accoucha. Elle avait fui de Bruxelles, juste avant l'arrivée des  Allemands, dans sa robe de chambre accompagnée d'un mari  sans manteau et souliers !

Très rapidement la maison se remplit et la maison d'à côté qui, par chance était libre, fut elle aussi louée.  Plus de 60 réfugiés furent nourris là chaque jour  (les femmes enceintes et leur entourage) et les deux maisons, avec leurs 18 ou 20 pièces, furent  entièrement occupées! Des familles entières étaient arrivées et ne voulaient plus prendre le risque de fuir plus loin par crainte de perdre l'un ou l'autre membre de la famille ou bien leurs bagages. Il apparut alors qu'il était  absolument nécessaire de trouver un autre endroit à réserver exclusivement à la maternité. Une autre maison fut donc trouvée et aménagée dans ce but. Les mamans à terme y étaient gardées jusqu'à la fin de la période de convalescence après l'accouchement.  Tout ce qui pouvait  améliorer le confort des jeunes mamans  fut mis en application car  le souhait de Mr Muir était que, de n'importe quelle manière, on arrive à considérer ces femmes comme des hôtes d'honneur à qui on ne devait rien refuser !

Les couffins furent faits à partir de paniers japonais  et ils furent garnis  de douces couvertures et draps. Il y eut une exception: un couffin fut créé à partir d'une caisse de bananes  par deux volontaires et faisait la fierté des volontaires qui avaient passé tant de temps à aider  la maternité.

Les bébés paraissaient tous merveilleux dans leur tenue et dans leurs chaussons en laine et, malgré les horreurs vécues par leurs mères, ils faisaient resplendir la joie sur les visages de leurs jeunes mamans. En vérité « le chagrin peut durer toute une nuit mais la joie revient le matin ». Les histoires des réfugiés étaient terribles et faites de souffrance et de privation sans compter les véritables  horreurs qu'ils avaient vécues. Une jeune femme,  accouchée de son troisième enfant, était à ce point  hantée par l'image de sa maison  en feu  qu'il n'y avait personne capable  de la distraire de  ses pensées morbides ou de ses cauchemars  nocturnes durant lesquels elle criait « brûlé, brûlé » !  Maintenant, installée dans un cottage avec le reste de sa famille, on peut espérer que l'affection des siens la fasse surmonter progressivement les horreurs vécues.

Une autre femme montrait pathétique la clef de sa maison en disant « C'est ma maison, c'est tout ce que j'en ai encore », ce qui  finalement était vraisemblable lorsqu'on sait  que beaucoup de maisons  furent rasées complètement. Pour d'autres réfugiés ce fut le voyage qui les traumatisa, un voyage en bateau qui dura cinq  longs jours  de port en port qui  refusait les réfugiés jusqu'au moment béni où le secours  fut enfin  trouvé à Folkestone.  Un autre réfugié raconta avoir passé  cinq jours dans sa cave pendant que les allemands bombardaient sa ville.  Chaque   réfugié avaient connu son lot de souffrance  qui avait rempli son cœur et ses  yeux et qui, de plus, avait noué sa gorge.  Chacun espérait cependant  que, dans la nouvelle vie qui commençait  pour eux, les souffrances passées  seraient  le terreau d'un avenir  plus radieux !

Une grande majorité des bébés (beaucoup de garçons !) furent appelés par  les noms des saints du jour. Cependant comme prévu, des noms à la connotation   patriotique furent donnés. Ainsi Albert fut utilisé mais aussi, Georges, Raymond, Nicolas qui représentaient l'entente cordiale entre les alliés. Miss Jones, l'infirmière  directrice adora les enfants et   fut elle aussi adorée car elle apporta amour et  sympathie aux mamans. De plus elle organisa elle-même une grande fête de Saint Nicolas suivie plus tard d'une fête de Noël autour d'un magnifique sapin couvert  de cadeaux pour chacun.  C'est ainsi que les 60 réfugiés belges, loin de chez eux,   purent quand même bénéficier de fêtes.

Quelques maris et épouses rétablis allèrent chercher refuge autre part dans la région. Finalement, le foyer fut bientôt pris en charge par le Comité des Réfugiés Belges qui sera aussi  reconnaissant à tous ceux qui pourront encore apporter aux réfugiés une aide  en  vêtements et souliers (enfants aussi bien  qu'adultes).

Folkestone est devenue une ville de Belges  nous entendons partout dans les rues parler français ou flamand. Nous avons aussi  obtenu la permission de visiter l'hôpital temporaire où séjournaient des soldats belges. Il n'y avait plus que quelques uns qui étaient confinés au lit, les autres  lisaient, fumaient ou jouaient aux cartes dans la salle de récréation où ils appréciaient le confort leur permettant de mieux  surmonter les événements récents et terribles qu'ils avaient vécus.

Mary Burr

Témoignage de Mary Burr paru dans le British journal of nursing  N° 1396 Saturday, January 2, 1915 Vol. LIV page 19 et 20.

Traduction Dr Loodts   



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