Médecins de la Grande Guerre

Le jeune poète de 12 ans, Robert Blindenbergh consola les soldats belges à Calais.

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Le jeune poète de 12 ans, Robert Blindenbergh  consola les soldats belges à Calais

       C’est un très jeune poète oublié de tous. Plus personne ne semble posséder les vers qu’il rédigea à l’attention des soldats belges hospitalisés dans nos hôpitaux établis dans le Pas-de-Calais. Quand la guerre éclate, il est âgé de 12 ans et, comme scout, rend quelques  services à l’armée avant de rejoindre avec ses parents la Base-Arrière de Calais.

       Le jeune poète est mort prématurément à l’âge de 16 ans en 1918. Il est fort à parier qu’il est décédé de la grippe espagnole. Au cimetière d’Ixelles, sa tombe jouxte le carré des soldats belges et la chapelle funéraire du médecin auxiliaire Foulon. La stèle funéraire nous interpelle car elle nous raconte brièvement une existence courte mais héroïque. Elle nous dit que Robert était connu comme scout et assez étrangement comme « lieutenant »…On peut imaginer que les soldats qu’il consolait par la récitation de ses vers l’appelaient ainsi tant il avait une allure martiale dans son uniforme impeccable de scout !

       Voilà la photo de sa tombe qui nous apparaît exactement comme se doit d’être la dernière demeure d’un poète.


        « Si j’ai charmé pendant quelques instants nos braves soldats, j’ai atteint mon but et j’ai pris ma part de feu » écrivit le scout, lieutenant, poète et sans doute fils adoré de ses parents.


Inscription sur la tombe

       Hélas, cette phrase du poète écrite sur sa tombe est la seule que nous avons retrouvée. Nous avons cependant la preuve du talent de Robert. Elle nous est donnée par les archives de Calais qui nous permet de lire un article publié le 1er décembre 1915 dans « La France du Nord » rendant compte du Gala des Rosati donné quelques jours auparavant au théâtre de Calais. Quelques mots d’explication sur cet évènement. La « Société des Rosati » fut fondée à Arras en 1778. Ce sont les membres calaisiens de cette société littéraire qui organisèrent en novembre 1915 une matinée culturelle au profit des prisonniers. Bien entendu, la présence anglaise et belge est importante dans l’assistance puisque Calais constitue une base logistique importante pour ces deux alliés de la France. Le général Cloothen, commandant de la Base belge de Calais, est d’ailleurs parmi les invités. Voici l’extrait de cet article qui mentionne les prestations du jeune Blindenbergh :

On se souviendra longtemps à Calais de cette superbe matinée.

Après l’exécution comme ouverture des hymnes nationaux français, belge et anglais par l’excellente musique du … territoriale, écoutés debout par la salle entière on eut le régal intellectuel de la présentation des Rosati faite en style aussi élevé que poétique par le distingué président de la nouvelle société M. Millequant.

La même musique ouvrait la seconde partie, avec un sémillant allegro "Le Rêve passe" et une belle fantaisie sur "Hérodiale" qui soulevèrent d’unanimes applaudissements.

La place nous manque pour nous étendre comme nous le voudrions sur le compte des éminents artistes que les "Rosati" avaient eu la bonne fortune de pouvoir grouper pour la circonstance ; contentons-nous de dire qu’ils se sont tous montrés à la hauteur de leur grande réputation.

M. Devriès, le suggestif artiste de l’Opéra Comique a chanté avec sa maestria, son style et son charme séducteur habituels le "Rêve de Manon", le lamento de la "Tosca" en français et en italien, la chanson de "Fortunio" et le Rhin allemand.

Une nouvelle ovation fut faite au grand artiste après chacun de ces morceaux.

Galipaux se chargea de donner la note fantaisiste et spirituellement enjouée dans plusieurs œuvres dont il est l’auteur et qui furent toutes également l’objet des plus chaleureux bravos.

Mlle Madeleine Roch s’éleva aux derniers degrés du pathétique avec une composition de M. F. du Croisset : À la gloire d’un héros belge, En avant, de Déroulède, la Mort des Loups, de M. Millequant et enfin avec les strophes enflammées de la Marseillaise qui valurent à la brillante tragédienne l’accueil enthousiaste qu’elle soulève au Théâtre Français et dans toutes les solennités parisiennes où elle interprète notre hymne national.

Mme Réjane fut acclamée dans le Carillon, une œuvre anglaise à la glorification de la Belgique martyre, mais aussi grande dans l’espoir des revanches futures que dans le sacrifice.

N’oublions pas le jeune boy-scout de 13 ans Robert Blindenbergh qui, précoce émule de Galipaux, interpréta ses propres œuvres avec une verve et un aplomb impayables. Son succès a dépassé toute limite.

       Espérons qu’un jour, nous puissions avoir plus de détails sur la courte vie du jeune poète dont les rimes, perdues pour nous, sont pour l’éternité le secret des soldats qu’il consola.

Dr Loodts P. 

 



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