Médecins de la Grande Guerre

L'histoire du caporal Léon TRESIGNIES.

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L'histoire du caporal Léon Tresignies.

Le caporal Léon Trésignies

Photo souvenir du caporal Léon Trésignies. (collection Jean-Paul Vanlierde)

Maison natale du caporal Trésignies à rue caporal Trésignies à Bierghes

Article d’un journal "Le courrier de l'armée" de 1920 concernant les souscriptions pour un monument à Pont Brulé en mémoire du caporal Trésignies.

Monument au Pont-Brûlé

Le Pont-Brûlé : sa position le 26 août 1914.

Pelouse d’honneur où est enterré le caporal Léon Trésignies

Tombe de neuf soldats allemands et un soldat belge à Pont-Brûlé lez Vilvordes

Le 31 août 1930, devant le mémorial du Pont-Brûlé, le major L. Tasnier rappela avec émotion la journée du 26 août 1914. (Le soir illustré du 6 septembre 1930)

Madame veuve Trésignies et son fils traversant le Pont-Brûlé en compagnie du colonel Borgerhout, délégué du Ministre de la Défense Nationale et de M. Victor Boin, président de l’Association des Journalistes Sportifs, qui organisa le pèlerinage. (Le soir illustré du 6 septembre 1930)

Le veuve de Trésignies et son fils fleurissant l’humble tombe de l’héroïque chasseur au cimetière du Pont-Brûlé. (Le soir illustré du 6 septembre 1930)

Décédé à Humbeek

Documentation reçue de Monsieur Jean Frings, du Rebecq Historical Association.

Ce héros national, tombé au Champ d’Honneur à Pont Brûlé, à l’âge de 28 ans, était né à Bierghes (Brabant), le 26 mars 1886.

En 1906, il fut incorporé au 2e Chasseurs à Pied à Mons et rendu à la vie civile, à l’issue de son terme, en 1909. Il fonda un foyer  et le couple fut comblé par la naissance d’un enfant.


Le caporal Léon Trésignies

En raison des menaces de guerre prochaine qui se précisèrent au cours de l’été 1914, Trésignies fut rappelé à la 2e compagnie du 3e bataillon du 2e Régiment de Chasseurs à Pied.

Après divers déplacements, le Régiment qui avait quitté Mons le 3 août 1914, gagna Willebroeck pour participer à partir du 21 août, à la défense du 4e secteur de la position fortifiée d’Anvers. Au cours de la première sortie, le 26 août, le 3e bataillon est arrêté dans sa progression par le canal de Willebroeck dont la rive Ouest est occupée par les Allemands. Le peloton du 1e Sergent-major Wery, auquel appartient Trésignies, a reçu l’ordre de franchir l’obstacle à Pont Brûlé, sur le territoire de Grimbergen.

Les Chasseurs parviennent à atteindre la rive Est à hauteur du pont, mais celui-ci est levé et sa manœuvre se commande de la rive ennemie, il faut coûte que coûte, parvenir à abaisser le pont-levis.

Trésignies se présente comme volontaire pour traverser le canal à la nage, griffonne quelques mots sur un bout de papier qu’il remet à son chef de peloton et plonge. Emu par tant d’héroïsme, Wery lui crie : « Trésignies, au nom du Colonel, je vous nomme Caporal ». Il parvient à atteindre le mécanisme du pont, mais il le manœuvre à l’envers. Ses camarades lui crient son erreur, il s’en rend compte et, tandis que le pont commence à s’abaisser, le Allemands ouvrent le feu, criblant de balles mortelles notre héroïque Chasseur.

Le Caporal Trésignies fut cité à l’ordre du jour de l’Armée, à la date du 15 septembre 1914, en ces termes : « Ce militaire s’est offert à son Commandant pour traverser à la nage le canal de Willebroeck  afin de glisser le tablier du pont qui devait se manœuvrer de la rive fortement occupée par l’adversaire. A été frappé mortellement pendant qu’il actionnait le mécanisme du pont. Sachant qu’ il allait à la mort, le Caporal Trésignies avec un courage d’une simplicité héroïque, a écrit son nom sur un bout de papier qu’il remit à un Sous-officier, puis partit pour ne plus revenir. Ce Caporal honore son Régiment, l’Armée et la Nation.


Le Pont-Brûlé : sa position le 26 août 1914.

Tresignies. Entre les plus beaux noms, son nom est le plus beau...

Ni Wallon ni Flamand : un Belge !

Le 26 mars 1886, il naissait à Bierghes, petite localité du Brabant, au savoureux patois, qui apparaît comme le trait d’union entre nos régions de culture française et les Flandres. Son père s’appelait Pierre – Joseph, sa mère Ricour, Marie – Thérèse. On le baptisa : Trésignies, Léon – Jules – Joseph.

Ouvrier aux chemins de fer de l’Etat, quand sa vingtième année sonna, il participa au tirage au sort. Le numéro 43 qu’il tira de l’urne le désigna pour le service militaire et pour….l’immortalité.

Le 15 juin 1906, il était incorporé en qualité de milicien de la province de Brabant, 6e canton, commune de Bierghes. Le 16 novembre de la même année, il franchissait les portes de la caserne Guillaume à Mons et sous l’uniforme, devenait un des coquets petits chasseurs de la bonne et joyeuse cité du Doudou.

Trésignies mesurait 1 m 60 ; des yeux gris, au regard volontaire, brillaient sous les arcades sourcilières très saillantes ; de beaux cheveux châtains ornaient un front très large. Une fine moustache blonde estompait la lèvre supérieure.

Comme tous ceux de sa compagnie, la 2e du 3e bataillon, il se rendit  aux plaines de Nimy et de Casteau pour y apprendre le noble métier des armes. La loi sur la milice de l’époque le rendit à ses parents dès le mois de mai 1907. Et le numéro 7 de la cité Jacquemin, à Forest, le revit très alerte, très propre, ouvrier consciencieux.

Les congés par interruption de service, venus à échéance, Trésignies regagnait la caserne pour achever son terme.

Le 16 juillet 1909, son congé illimité lui était délivré pour Forest – lez – Bruxelles, rue du Dries, numéro 85.

Il s’y mariait en 1910.

Il vivait heureux. Le babil d’un enfant égayait les heures de repos.

1914 – La guerre !

Trésignies est de la plus ancienne classe de milice inscrite sur les contrôles pour la formation de l’armée de campagne.

Joyeux, il rejoint le dépôt du 2e chasseurs à pied à Contich, et le 5 août, à Perwez, il retrouve ses camarades de la 2e du III, partis de Mons le 3 août.

Tous, ils veulent « bouter dehors » l’envahisseur parjure.

La tâche est bien lourde à leurs frêles épaules. Pourtant Visé, Liège, Haelen, Hauthem – Sainte – Marguerite s’auréolent de gloire.

Mais sous les coups répétés, le soldat belge chancelle, son douloureux calvaire commence, l’armée belge se replie à l’abri des forts d’Anvers.

Au sud de notre réduit national, les Allemands maudits organisent la ligne Merchtem – Wolverthem – Humbeek – Eppeghem – Hofstade – Haecht – Wygmael – Kessel-Loo. Deux corps contiennent notre armée pour protéger la marche de tant d’autres en route pour Paris.



Décédé à Humbeek

Remplissant une dure mais glorieuse mission, l’armée belge va unir ses efforts à ceux des alliés pour alléger la tâche incombant à ceux-ci.

Le 24 août a lieu la première sortie d’Anvers.

Le 25 août le 2e chasseurs à pied était engagé à Eppeghem ; dans la soirée, le 3e bataillon était dirigé sur le Pont-Brûlé, hameau situé à 3 kilomètres au nord de Vilvorde, sur le canal de Willebroech. C’est là que se trouve le seul pont permettant de gagner Grimberghen.

En arrivant sur les lieux, les chasseurs avaient pu constater que l’ennemi s’était replié sue la rive ouest du canal.

Les dispositions furent prises pour procéder dès l’aube à l’attaque du point de passage.

A Pont-Brûlé, le canal s’oriente du sud au nord. Le hameau, groupé autour de l’église, s’étend sur la rive ouest. Les Allemands s’y étaient organisés, occupant les maisons où, presque à bout portant, ils tenaient sous leur feu le pont même. Celui-ci, jeté sur une partie rétrécie du canal, est un pont-levis, dont la manœuvre s’opère de la rive tenue par l’ennemi.

Dans la nuit, les Allemands l’avaient relevé à demi, supprimant ainsi toute possibilité de passage. En outre, une fraction des leurs garnissait quelques bouts de tranchées édifiés le long même du canal, immédiatement au nord du pont.

La 2e compagnie du 3e bataillon (capitaine Hellin) est sur la rive est, déployée, face à l’ennemi.

Le peloton dont fait partie Trésignies, commandé par le 1e sergent-major Wéry, tient le passage sous son feu.

A l’aube, un ordre : « La progression de la veille est reprise. Le 3e bataillon opérera sur la rive ouest, la 2e compagnie formera l’avant-garde. » Au peloton Wéry l’honneur de franchir le canal. Mais comment ? Un seul passage, le pont ! Le tablier est levé, impossible de passer…L’ordre est formel, il faut aller de l’avant. Que faire ? Ah, si le pont était abaissé ! Malgré les Boches, les balles et les mitrailleuses, on passerait.

Dans la tranchée un chasseur s’est levé. Sans mot dire, il se débarrasse de son shako, de son sac, de sa capote et se présente au 1e sergent-major Wéry. « Pour les miens, si je ne reviens pas. » C’est sur un bout de papier, l’adieu suprême du soldat à sa femme, à son enfant.

Il a plongé, la rive ouest est atteinte, le voici manoeuvrant le mécanisme. Fatalité ! Le pont se redresse de plus en plus : Trésignies actionne en sens inverse ! On crie, on hurle : « De l’autre côté ! » C’est l’alarme donnée. Les Boches font feu.

Sous les rayons éblouissants d’un soleil radieux, Trésignies tombe, criblé de balles, ayant tout donné pour son Roi et sa Patrie.

Est cité à l’ordre du jour du 15 septembre 1914 :

Trésignies  Léon, caporal, 2e compagnie, 3e bataillon du 2e Chasseurs.

Ce militaire s’est offert à son commandant pour traverser à la nage le canal de Willebroeck afin d’abaisser le tablier du pont qui devait se manœuvrer de la rive fortement occupée  par l’adversaire.

A été frappé mortellement pendant qu’il actionnait le mécanisme du pont.

Sachant qu’il allait à la mort, le caporal Trésignies, avec un courage d’une simplicité héroïque, a écrit son nom sur un bout de papier qu’il remit à un sous-officier, puis partit pour ne plus revenir.

Ce caporal honore son régiment, l’armée et la nation.



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